Pichon Rivière avec Lautréamont:

Entre la psychanalyse, l'art et la folie

Rosa López

Présentation

Nous recevons ce soir Rosa López, psychanalyste membre de l'école lacanienne de psychanalyse, et originaire de Córdoba de la Nouvelle Andalousie. C'est donc tout naturellement en tant que compatriote à plus d'un titre, qu'il me revient de vous la présenter. Elle est diplômée en psychologie à l'Universidad Nacional de Córdoba. Aussi, elle a été membre de l'équipe de Psychopathologie de l'Hospital Nacional de Clínicas de Córdoba jusque en 1976, puis membre des équipes de Thérapie Brève de l'Hospital Colonia Santa María de Punilla, et de l'Equipe de Santé Mentale de l'Hospital Misericordia à Córdoba.

Je veux vous dire que sa présence ici relève de quelque chose qu'elle va aborder bien mieux que moi à propos de Enrique Pichon Rivière: des rapport de l'inquiétante étrangeté et du merveilleux. Je crois, que sa présence ici relève à la fois de l'inquiétante étrangeté et du merveilleux.

Commençons par le merveilleux: sa présence ici est une démentie à la désormais célèbre phrase d'Alain Touraine, qui eut un grand retentissement: "l'Argentine n'existe pas". Démentie qu'il a faite lui même dès le lendemain d'avoir prononcé à cette même Maison de l'Amérique Latine ces mots, en disant "je n'ai pas dit que les argentins n'existaient pas". Mais tout de même sa présence ici tient du merveilleux. Merveilleux qui frise le miraculeux lorsque nous apprenons qu'entre le moment où nous avons donné forme au projet et aujourd'hui les coûts de son voyage se sont multipliés par trois ou quatre, et que le nombre de pauvres s'est multiplié selon les mêmes proportions. Enfin, miracle certain dont je ne chercherai pas à savoir d'avantage, qu'elle ait réussi à sauter le "corralito" pour pouvoir venir... C'est vrai, pour revenir aux mots d'Alain Touraine, que plusieurs Argentines sont en train de disparaître, peut être définitivement. Mais ils en restent d'autres, et c'est tout le sens que nous voulons donner au travail de notre association: raffermir des liens franco-argentins, peut être aujourd'hui plus nécessaires qu'hier.

C'est aussi tout le sens de sa conférence de ce soir: des liens franco-sudaméricains, comme Enrique Pichon Rivière et Isidore Ducasse les incarnaient sans métaphore. Des nœuds entre la France, l'Uruguay et l'Argentine. Mais aussi des nœuds entre des langues: français, castillan, guarani. Des nœuds entre des êtres sortis de la merveilleuse inquiétante étrangeté du Comte de Lautréamont et ceux sortis des profondeurs de l'Impenetrable du Chaco, des êtres mytiques guaranis. Et puis des nœuds plus personnels comme ceux entre Enrique Pichon Rivière et Lautréamont et ceux de Rosa López à l'un et à l'autre.

Et nous passons ainsi au versant inquiétant et étrange de sa conférence, ce soir. L'hypothèse de Rosa López fait du Comte de Lautréamont le cas princeps d'Enrique Pichon Rivière, en ceci justement qu'il constitue un noeud où l'angoisse est omniprésente. Pichon n'arriva pas à faire complètement de Lautréamont un cas, son cas. Le texte désormais classique "Psicoanálisis del Conde de Lautréamont" fut publié post-mortem en 1992 par Marcelo Pichon Rivière, le fis écrivain d'Enrique. Il comprend une conférence publiée en 1949, puis des fragments d'un cours donné à l'Instituto Francés de Estudios Superiores en 1946. Enfin, la partie essentielle du livre ce sont des manuscrits soigneusement conservés par Pichon Rivière à sa maison de Punta del Este en Uruguay, datant de 1946 mais dont certains portent la trace de notes et de réélaborations postérieures. Nous sommes donc devant une œuvre inconcluse, un nœud lâche.

Depuis Léon Bloy, Rémy de Gourmont, et plus tard les surréalistes, il s'est tissé une "légende noire" autour de Lautréamont : "une atmosphère de terreur, d'épouvante et son influence satanique paraît s'être exercé sur certains de ceux qui se sont intéressés à son œuvre, puisqu'ils sont devenus fous ou se sont suicidés", dit Pichon. Nous voilà devant un nœud qui serre bien... "Lorsqu'il parlait de son livre, dit Marcelo Pichon Rivière, mon père disait souvent qu'il n'allait jamais le finir par peur de rentrer en contact avec le Comte et subir un malheur imprévu, et il détaillait - comme quelqu'un qui énumère ses trésors - la liste de suicides, morts étranges et attaques de folie qui ont marqué la famille Ducasse et ceux qui ont approché le poète". Et bien, voilà la tâche à laquelle s'attaque Rosa López! Tâche surréaliste qu'elle affronte courageusement. Peut être parce que cette tâche est aussi surréaliste et courageuse que de survivre au milieu des présidents qui disparaissent, des banques qui disparaissent, d'horizons qui disparaissent, sorte de malédiction argentine comme titrait Libération en décembre 2001, une autre sorte de légende noire... Tout ce merveilleux et cette inquiétante étrangeté nous est donc naturel. Je suis donc très heureux de lui laisser la parole.

Eduardo Mahieu, Paris, le 28 Mai 2002.
 

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Pichon Rivière avec Lautréamont:

Entre la psychanalyse, l'art et la folie

Rosa López
Traduit de l'espagnol par Paula Winocur

Ma rencontre avec Pichon Rivière a été tardive et particulièrement émouvante car ma recherche d'indices de son travail sur Lautréamont et sa folie a été traversé, d'un bout à l'autre, par une recherche plus personnelle. Ces deux recherches se sont sûrement traversés, en provocant des mouvements comme ceux de Pichon recherchant et suivant les traces de Lautréamont. Cette rencontre est pleine de voyages, de langues, Paris, Andalousie, Luján, Córdoba, Uruguay. Le cas est que ce qui a commencé, d'une manière surprenante, en 1992, a été suivi par un passage au public en 1996/97, dans le cadre des activités de l'école lacanienne de psychanalyse. Dans le premier paragraphe de l'argument élaboré à ce sujet, et selon ce que nous avons exprimé dans sa première réunion, il y a eu une phrase que j'ai écrit et que disait: "dirige tes pas en arrière, ne continue pas, si tu le fait tu dois savoir que tu feras partie du texte qui va être écrit". Quelle manière de commencer ce travail!, ai-je dit à cet occasion. Puisque tous, absolument tous ceux qui ont revu l'argument ont cru qu'il s'agissait d'une citation de Lautréamont. Je la retournait, la mettait sous une autre forme, mais il n'y avait pas de manière! J'ai pensé à l'enlever; j'ai senti une gêne très particulière. Elle avait été saisie en tant que texte de Lautréamont, ce qui ne cessait pas de me paraître inquiétant, alors que justement, mes paroles se rapportaient à cela. Alors, j'ai décidé que ce texte devait rester là.

Pour continuer avec le contenu de l'argument, je me suis alors rapportée aux circonstancexs de ma rencontre avec Pichon Rivière, Isidoro Ducasse/Comte de Lautréamont, Vicente Zito Lema, Jacobo Fijman, entre autres. J'ai dit: "Pouvoir vous transmettre cela rend impossible la chronologie. Il y a eu de bornes, des rencontres qui ont provoqué en moi cette "inquiétante étrangeté" et qui ont eu à la fois le caractère d'un éclair, un flash qui a illuminé cette voie que je vous propose aujourd'hui de parcourir". Comme vous pourrez noter, le caractère du séminaire/atelier auquel ma rencontre avec Pichon Rivière a donné lieu, a été très lié à la propre expérience, aux raisons de la recherche et de la rencontre que, dans le livre, après toutes les révisions et "purifications", se sont perdus et il ne reste pas clair comment je suis prise là, comment la voie du témoignage a fait le chemin.

Ce que je veux alors souligner chez Pichon Rivière est ce qui suit: se laisser apprendre par l'artiste, comme Pichon étant enfant s'est laissé apprendre par la culture, la langue guarani, dans laquelle il dit que "reste dans les actes quotidiens, dans les mythes et légendes, une profonde poésie". Laisser germer tout ceci, et donner ses fruits avec cette même ouverture inquiète dans sa rencontre avec la folie. Ceci m'a semblé être la caractéristique la plus remarquable à prendre en compte chez Pichon Rivière et, évidemment, ce qui m'a particulièrement rapproché à lui.

Je fais, surtout, allusion au Pichon Rivière des années 30 à 50, le plongeur, le Pichon passionné qui a proposé, ainsi, une forme de travail particulière avec la folie. C'est de cette manière que dans ce mode de faire personnel, l'autobiographique se tisse à ses recherches, mais aussi ses recherches à l'autobiographique, et il nous le fait savoir à plusieurs occasions. Sans aller plus loin, dans la préface de son œuvre écrite. Sa rencontre précoce avec la culture aborigène guarani, avec laquelle il a partagé une terre vierge et sauvage après d'être né dans l'Europe du début du siècle, devient pour lui une source inépuisable de questionnements et de motivations.

De quelle manière Pichon pénètre et habite Les Chants de Maldoror, et à la fois, comment il y est habité par les mêmes? Quelles sont les particularités qui existent chez Isidore Ducasse et à la fois chez Pichon Rivière pour qu'il se transforme pour lui, en un conducteur dans son travail sur la folie? Comment ceci s'enchaîne avec ses expériences premières, s'il a besoin d'ouvrir la préface de son œuvre avec un poème comme exergue écrite par lui-même en français à l'âge de 16 ans?

Connaissance de la mort

Je te salue                                 Te saludo

mon cher petit et vieux             querido pequeño y viejo

cimetière de ma ville                 cementerio de mi ciudad

où j’appris à jouer                     donde aprendí a jugar

avec les morts.                         con los muertos.

C’est ici où j’ai voulu                 Ahí fue donde quise

me révéler le secret de             revelarme el secreto de

notre courte existence             nuestra corta existencia

à travers les ouvertures             a través de las aberturas

d’anciens cercueils solitaires.     de antiguos féretros solitarios

Il écrit à continuation:

"Comme chronique de l'itinéraire d'une pensée, elle sera nécessairement autobiographique, dans la mesure où le schéma de référence d'un auteur ne se structure pas seulement comme une organisation conceptuelle, mais elle est soutenue dans un fondement motivationnel d'expériences vécues. A travers elles, le chercheur construira son monde interne, habité par de personnes, lieux et liens [vínculos], qui en s'articulant avec un temps propre dans un processus créateur, vont configurer la stratégie de la découverte".

Dans cette préface écrite autour de 1971, date de la parution de son œuvre, c'est-à-dire 6 ans avant sa mort, nous retrouvons un Pichon qui a substantiellement modifié son cadre référentiel, comme il le nomme. Les expériences de sa vie, qu'il essaie de tisser dans son "organisation conceptuelle", se perdent dans l'enchevêtrement de concepts qu'il verse. Il s'agit d'une préface à une œuvre qui ramasse les lettres dispersées dans des différentes périodes de son expérience et de sa pensée, et qui a été écrite dans un temps tardif; tardif par rapport aux conférences qu'il avait donné sur Lautréamont en 1946, mais aussi par rapport à ses études sur la schizophrénie et l'épilepsie; tardif aussi par rapport au texte freudien dont il ne s'en servait plus, sauf quelques occasions comptées, depuis un certain temps. Nous pouvons dire que cette préface rassemble peut être, ce qui ne peut pas être rassemblé, et il le fait en le mettant des apparences de "conceptualisation" à ce qui n'est pas possible de conceptualiser. Malgré ça, nous allons extraire ce qui a à voir avec ce temps de son expérience, qui l'a attrapé, qui nous a attrapé.

Il continue de cette manière:

"Mon intérêt pour l'observation de la réalité fût, au début, de caractéristiques pre-scientifiques et, plus exactement, mythiques et magiques (..)

"La découverte de la continuité entre rêve et vigile, qui est présente dans les mythes qui ont accompagné mon enfance et dans les poèmes qui témoignent de mes premiers efforts créatifs, sous l'influence double et fondamentale de Lautréamont et de Rimbaud, ont favorisé en moi, depuis l'adolescence, la vocation pour l'inquiétante étrangeté".

"La surprise et la métamorphose, en tant qu'élément de l'inquiétante étrangeté, la pensée magique, structurée comme identification projective, configurent une interprétation de la réalité caractéristique des populations rurales influencées par la culture guarani, où j'ai vécu jusqu'à 18 ans . (...) les notions de mort, deuil et folie constituent le contexte général de la mythologie guarani.

"L'internalisation de ces structures primitives ont orienté mon intérêt vers le dévoilement de ce qui est implicite, avec la certitude que derrière chaque pensée qui suit les lois de la logique formelle, reste un contenu qui, à travers différents processus de symbolisation, inclut toujours une relation avec la mort dans une situation triangulaire"

Ces éléments le conduisent, évidemment, à sa rencontre avec La Gradiva et L'Inquiétante Etrangeté et marquent sa lecture de Les Chants et sa tentative de faire cas de Lautréamont-Ducasse.

Dans la mythologie, le chant et la religion des guaranis, qui ont donné à Pichon Rivière sa deuxième langue avant d'acquérir la maîtrise de l'espagnol, se trouvent des éléments qui, évidemment, ont du impressionner d'une manière très particulière au jeune Pichon qui s'était disposé à lire ces pages sombres de Les Chants.

Faisant un parcours rapide, et en sélectionnant ce qui s'approche de ce qu'il lit dans Les Chants, signalons que dans la conception guarani, animal, personne et astres se mélangent et se métamorphosent constamment. Selon cette conception, les animaux ont de pouvoirs magiques et ils mènent une double existence dans le ciel et dans la terre - ils croient dans l'immortalité de l'âme. Un exemple de ceci, le nandou du ciel nocturne, ñanñandu, qui outre l'autruche, il représente aussi le nom collectif de tout type d'arachnides, et signifie aussi la Voie lactée. Au fond, tout signifie la même chose: "ce qui nous mange". Le mythe est construit avec les caractéristiques de ces animaux: le nandou est terriblement vorace et l'araignée sans doute aussi.

Dans les légendes guaranis et de la culture créole du littoral, ils existent divers personnages dionysiaques: Añá, Seigneur des ténèbres, auquel elles attribuent toute maladie étrange, la folie et les mortes violentes. Il prend, quelques fois, la forme d'un insecte, le añacuá - comme vous pouvez noter, la métamorphose et le bestiaire sont présents dans absolument toutes ses légendes, mythes et chants -; le Acá Peré, personnage mythique qui est représenté comme un indien avec une blessure horrible dans la tête, de laquelle il sort de vers de terres et de mouches; Porá, une âme maligne qui guette, invisible, les sites qui lui sont familiers, en semant la frayeur et aussi la mort. Dans les nuits orageuses divague aux alentours des tombeaux et effraye souvent les enfants.


Illustrations de Luis Scafatti, in A. Colombres, Seres Mitológicos argentinos, Emecé, 2000

Il existe dans la mythologie guarani des êtres bénéfiques et démoniaques. Pour les guaranis, la parole est un don envoyé par les dieux. Karaí Ru Eté Mirí - Vrai Petit Père - crée mais pas engendré, est le Dieu du feu et il est chargé d'envoyer les paroles-âmes aux hommes, Ñamandú est un autre des Premières Quatre Pères de la Parole, avec Tupá.

Le culte a beaucoup à voir avec les façons dont ces derniers sont protégés et tranquillisés afin de les laisser développer ses activités - chasse, récolte, etc. Le Yáwa, est le jaguar mythique qui lutte contre Yacy, l'astre lune pour le manger (si cela arrive, c'est l'éclipse). Le Yaguaretyé-Aba qui est un homme-tigre. Dans la mythologie guarani, le mouvement est pris en compte et c'est ainsi que l'apparition et la disparition des astres, l'éclair, vont faire partie de la même à travers des métamorphoses: le Ñandú Tata, autruche entourée de feu qui court très vite et qui si on la croise, on meurt en 24 heures. Le Miñocao, un ver de terre gigantesque et terrible, dont sa présence se manifeste par des forts déplacements de l'eau. Le Mati-Taperé représente les terreurs nocturnes, Juruparí, est un être maligne qui symbolise les rêves fiévreux et le délire. Marangigona est le double de la personne et il a des caractéristiques d'un être surnaturel. Le Curupí, qui est une divinité masculine très connue en Corrientes et Misiones qui se caractérise par un membre viril qui tourne plusieurs fois autour de la ceinture et avec lequel il peut féconder les femmes de loin. Parfois, il vole des enfants et il peut tuer le chasseur dépourvu en lui mangeant le cœur. Il a un caractère évidemment dionysiaque qui avec son démesuré membre viril, peut lasser ses victimes. Le Boyguasu-Tumpa est le propriétaire de tous les animaux et obéit à Añá- Tunpa et il est représenté comme un serpent, il châtie avec de flèches invisibles à ceux qui ne suivent pas ses lois à la chasse.

Pichon Rivière comprend que les mythes jouent un rôle important et c'est par conséquent, un matériel à déployer à l'écrit. Un échantillon: dans le Chant V strophe 7 Pichon fait appel aux différents mythes sur l'araignée qui sont en jeu pour faire partie du texte. Ici, en effet, Maldoror convoque à travers son cauchemar, une araignée d'une espèce géante. Pichon nous dit que dans les Métamorphoses d'Ovide, Aracné est une femme, Lydie qui croit dépasser Minerve dans l'adresse avec la toile. Une lutte est entamée entre les deux pour voir qui tisse le mieux.

"Le tissage de Minerve - dit Pichon - représente les métamorphoses par lesquelles certains dieux ont châtiés ses rivaux, tandis que la toile d'Aracné représente les dieux déguisés, métamorphosés, pour pouvoir satisfaire ses amours interdits. Par rapport au contenu des amours, on voit que l'inceste et l'homosexualité sont leur base. Minerve se métamorphose pour châtier, on pourrait dire les métamorphoses du surmoi, tandis que celles d'Aracné seraient les métamorphose destinées à satisfaire les instincts. Le pêché d'Aracné est celui d'avoir dénoncé les tendances inconscientes, surtout l'inceste et l'homosexualité. Minerve transforme son rivale en une araignée."

Il établit aussi une relation entre Aracné et Ananké (destin). Il cite un travail de Charles Boduin, Psychanalyse de Victor Hugo, dans lequel l'auteur, suivant à Otto Rank, dit que "l'araignée représente toujours le symbole de la mère dangereuse qui a réussi à emprisonner l'enfant dans les mailles de sa toile".

Par ailleurs, il fait constater qu'on l'utilise dans les pratiques de la magie homéopathique ou de la magie imitative, dont on arrive à avoir des effets dans le corps par de substances en provenance des êtres qui représentent la fonction perdue, comme Frazer l'exprime dans Le Rameau d'Or.

Frazer cite aussi le rapport pour certains indigènes entre l'araignée et le destin.

Un autre travail cité par Pichon est celui de Henry Nicod qui présente l'araignée comme une devineresse dans de tribus d'Afrique. L'origine de sa sagesse naît d'une légende: le Créateur s'unit avec sa mère, il fait de sa mère sa femme. Un enfant naît d'elle qui, à son tour, quand il grandit choisit comme objet d'amour à sa mère. Le Créateur l'expulse de chez lui. Frustré par ses parents, il se transforme en une araignée et il va régir les destins de la tribu, il sait tout parce qu'il est le fils du créateur.

Le tarentisme, qui est le mal que vulgairement on croit qu'il a été produit par la piqûre de la tarentule, provoque une immobilité qui, selon la croyance populaire, est seulement guéri par la musique et il cite aussi l'origine de la danse tarentelle qui se réfère à une épidémie de "tarantisme" au Moyen âge. La piqûre provoquait d'abord, une profonde dépression et ensuite, un état d'excitation, un cycle maniaque dépressif.

Finalement, Pichon soutient que, pour la psychanalyse, l'araignée représente le symbole d'une mère castratrice, hostile mais avec un pénis, pouvant lire ainsi ce type de symbolisme psychanalytique comme mythologie. Et il signale que Freud a souligné que la femelle est plus grande que le mâle et dans une course, celui-ci est vaincu et dans plusieurs cas, il est dévoré par la femelle.

Maldoror dit que dans son rêve, l'araignée grimpe par les socles d'ébène de son lit de satin. Elle lui "étreint la gorge avec les pattes" et lui "suce le sang avec son ventre". Pichon signale, à juste titre, que si l'araignée mord et empoisonne ce n'est pas avec le ventre mais avec ses mandibules; "dans le ventre elle a ses organes génitaux" et s'en remettant aux connaissances de l'histoire naturelle de Lautréamont, il ne peut pas laisser passer cette donnée, en concluant donc que la succion est réalisée par les organes génitaux. La suite démontre que toute l'introduction sur les différents mythes sur l'araignée n'étaient pas de trop. Maldoror dit:

"Prends garde à toi, tarentule noire; si ta conduite n'a pas pour excuse un irréfutable syllogisme, une nuit je me réveillerai en sursaut, par le dernier effort de ma volonté agonisante, je romprai le charme avec lequel tu retiens mes membres dans l'immobilité, et je t'écraserai entre les os de mes doigts (...)".

Du ventre de l'araignée sortent deux personnages Elsseneur et Réginald, deux adolescents à qui il a donné son amour, en finissant sa relation comme toujours, avec l'attaque de la part de Maldoror avec son couteau, au milieu d'une scène d'amour, donnant au récit toute la connotation d'une érotique particulière avec un couleur sadique.

Le bestiaire et la métamorphose occupent une place proéminente. Dans le chant IV strophe 6, il définit la métamorphose comme "un mécanisme par lequel le poète ou créateur exprime certaines situations psychologiques qui doivent être interprétées comme le contenu d'un rêve": Maldoror converti en cochon, en cygne noir, l'homme avec une nageoire dorsal, etc.

Apparaissent ainsi le requin, le poux, le poulpe, la sangsue, le serpent, des oiseaux prédateurs, le crabe; il y a en outre des animaux mixtes comme dans les rêves et dans les mythes.

Dans le Chant IV, strophe 4 il se présente bloqué, immobile, son corps est en train de se métamorphoser en végétation vivante jusqu'à la hauteur de son abdomen, ses pieds sont des racines. En lui nichent des animaux: [crapaud]

"Prenez garde qu'il ne s'en échappe un, et ne vienne gratter, avec sa bouche, le dedans de votre oreille".

Pichon lit le contenu sexuel évident de cette phrase, encore plus lorsque le crapaud a été une des formes dans lesquelles Dazet a été métamorphosé. Il transcrit le reste du paragraphe : [le crapaud et le caméléon qui niche aussi de temps en temps]

"et sucent la graisse délicate qui couvre mes côtes: j'y suis habitué. Une vipère méchante a dévoré ma verge et a pris sa place: elle m'a rendu eunuque, cette infâme. Oh! si j'avais pu me défendre avec mes bras paralysés; mais je crois plutôt qu'ils se sont changés en bûches. [...] Deux petits hérissons, qui ne croissent plus, ont jeté un chien, qui n'a pas refusé, l'intérieur de mes testicules: l'épiderme, soigneusement lavé, ils ont logés dedans. L'anus a été intercepté par un crabe; encouragé par mon inertie, il garde l'entrée avec ses pinces, et me fait beaucoup de mal. Deux méduses ont traversé les mers, immédiatement alléchées par un espoir qui ne fut pas trompé. Elles ont regardé avec attention les deux parties charnues qui forment le derrière humain, et, se cramponnant à leur galbe convexe, elles l'ont tellement écrasé par une pression constante, que les deux morceaux de chair ont disparu, tandis qu'il est resté deux monstres, sorties du royaume de la viscosité, égaux par la couleur, forme et la férocité. Ne parlez pas de ma colonne vertébrale puisque c'est une glaive!"

Dans la préface à son œuvre, Pichon Rivière continue:

"Situé dans un contexte dont les relations causales étaient cachées par l'idée de l'arbitraire du destin, ma vocation analytique surgit comme nécessité d'éclaircissement des mystères familiaux et d'investigation des motifs qui régissaient la conduite des groupes immédiat et médiat. Les mystères non éclaircis sur le plan de l'immédiat (ce qui Freud appelle "le roman familial") et l'explication magique des rapports entre l'homme et la nature ont déterminé en moi la curiosité, point de départ de ma vocation pour les Sciences de l'homme".

Pichon affirme que le mystère, l'imprévisible l'ont attrapé depuis l'enfance, ce qui l'amène à s'appuyer sur Freud et fondamentalement dans La Gradive et L'Inquiétante Etrangeté.

Peut être une des raisons qui l'ont éloigné de la psychanalyse freudienne était le fait de la question de la cause en psychanalyse, penser que ces relations causales cachées dans la pensée magique trouveraient un éclaircissement dans la psychanalyse, c'est-à-dire que la psychanalyse lui donnerait le savoir nécessaire des motifs de la conduite humaine, en définitive, le savoir sur la vérité. C'est du côté du trou - du savoir - qu'il faut chercher la cause matérielle. Le problème pour la psychanalyse n'est pas du côté de ce qui remplit le vide, ni du côté de ce qui le contient, mais de ce qui le cause.

Son rapprochement à la psychanalyse, il l'explique dans la préface de cette manière:

"En prenant comme point de départ les données que sur la structure et les caractéristiques de la conduite déviée me fournissait le traitement des malades, et orienté par l'étude des œuvres de Freud, j'ai commencé ma formation psychanalytique. Celle-ci finit, des années plus tard, avec mon analyse didactique réalisé avec le Dr. Garma.

"Grâce à la lecture du travail de Freud sur "La Gradive" de Jensen, j'ai eu le vécu d'avoir trouvé le chemin qui pourrait me permettre d'obtenir une synthèse, sous le commun dénominateur des rêves et de la pensée magique, entre l'art et la psychiatrie".

Cette manière de nous présenter ce qui fût son œuvre, lorsque la fin de sa vie était proche, cette façon de tisser cette partie de sa vie qui s'est faite œuvre, en tissant poésie, culture guarani et travail avec la folie, psychanalyse et psychiatrie, constitue pour le moins, pour ceux parmi nous qui sommes dans cette voie, une invitation à pénétrer ce chemin pour voir comment il fût construit.

Ce qu'il esquisse dans la préface est présent, comme nous l'avons vu, dans son travail avec Lautréamont et dans son travail avec la poésie et la folie: l'autobiographique avec le mythique, l'étude de L'Inquiétante Etrangeté de Freud, les critiques à ceux qui n'ont pas réussi à pénétrer dans la lave brûlante des Chants, le mystère et la mort.

Quand il travaille sur El objetivo estético para una mesa redonda organizado por el Museo Nacional de Bellas Artes en 1963, il parle du créateur et aussi de l'objet esthétique. Celui qui surgit, dit-il, dans un moment donné de nôtre culture. Il se réfère alors au mobile, puisque c'est de cela que traite l'exposition. Il y a là deux lignes d'analyse.

Lorsqu'il essaie de généraliser, de comprendre le phénomène en tant que phénomène social, il y apparaît une autre terminologie éloignée de la psychanalyse freudienne: résistance au changement. Quand il essaie de saisir le fait en soi, il surgit une autre chose: il met en rapport le mobile avec les mouvements d'automatisation, à l'emploi de machines cybernétiques. Le caractère essentiel est donné ici par le mouvement. Il nous confronte avec l'étrangeté de l'autonomie du mouvement et la sensation de l'inquiétant. Le vécu du merveilleux est produit, selon lui, après une élaboration consciente, fait avec lequel nous ne sommes pas d'accord parce que si ce passage se réalise, il n'est pas conscient.

Alors, il se demande pourquoi Di Segni - l'artiste dont il est en train de parler et qui fut son patient - a du faire appel au mouvement afin de résoudre une situation interne. Ce qui surgit quand on étudie la préoccupation pour le mouvement des peintres et des sculpteurs - et ceci apparaît souligné par Pichon, ici en particulier avec le mobile - est fondamentalement le sentiment de mort. Il ramène Eliot - mais il pourrait ramener Lautréamont- peut-être parce qu'il a plus à voir avec le temps dans lequel il est situé vis-à-vis l'artiste, à la fin des années 50, début des années 60, et à un poème où il insiste que tout ce qui est vivant est ce qui peut mourir. Pour Pichon, l'œuvre d'art qui s'en sert du mouvement met en évidence que celui qui est mort peut être récrée dans l'œuvre artistique à travers ce mouvement.

Dans un des mobiles, El pintor loco, les mouvements semblent mouvements de folie mais, dit-il, il y deux vécus: une expérience qui a de rapports avec le mouvement automatique comme indépendant du contrôle humain, comme pensée magique et animiste et une autre, l'équilibre permanent, qui s'oppose à la rupture ou au chaos. Il fait appel, comme à d'autres plusieurs moments de son œuvre, à l'article de Freud de L'Inquiétante Etrangeté quand il parle des objets automatiques, des poupées automatiques, c'est-à-dire pour parler de l'expérience qui surgit quand des objets inanimés ou inhumains se présentent en mouvement. Le merveilleux, dit-il, est l'élaboration, par le biais de processus mentaux complexes, de l'expérience de destruction, de mort et de l'inquiétant.

Nous avons fait un rapprochement à la manière dont Pichon Rivière lit Les Chants de Maldoror. Nous devons signaler que, malheureusement, nous n'avons pas la transcription du cours qu'il a fait en '46. Pendant que Pichon était vivant, plusieurs de ses articles ont été publiés, quelques uns ont été recueillis dans El proceso creador. Marcelo Pichon Rivière, le fils poète, un des trois fils de Pichon, a publié à titre posthume ce qui a été appelé Psicoanálisis del Conde de Lautréamont. On se demande ce que serait un psychanalyse du Comte de Lautréamont, étant donné que le Comte de Lautréamont est un pseudonyme de l'auteur Isidore Ducasse. On peut évidemment commenter Les Chants, en se mettant dans la peau d'Isidore, fait avec lequel on ne se fait pas Isidore mais on fait partie du texte avec la fibre de celui qui le lit et qui fait de commentaires de cette place là. Ou on peut commenter à une distance prudente et mettre à Ducasse dans une sellette et de là, analyser son style, ses influences, sa morale, son psychisme. Evidemment, Ducasse a alimenté avec son écriture, tout type d'interprétations.

Cependant, faire un psychanalyse est plus qu'abusif dans le sens où Les Chants ne sont pas tout d'abord une autobiographie d'Isidore, et le Comte de Lautréamont ou Maldoror ne sont pas Isidore, même s'ils font partie de lui. On ne peut pas non plus, faire une psychanalyse avec un autobiographie. Quel rapport aurait une autobiographie avec la méthode psychanalytique créée par Freud? De toutes manières, il faut signaler que c'est seulement dans le titre du livre publié par Marcelo Pichon Rivière que la Psychanalyse du Comte de Lautréamont figure comme titre du Cours sur Lautréamont. L'étude publié de ce qui fut ce Cours a de fils conducteurs différents, et si vous avez eu accès à ce texte, vous aurez peut être du noter qu'un de ces fils, qui ne cesse pas d'être forcé, est celui de "psychanalyser" le texte Mais, nous le signalons, il n'est pas le seul fil.

Et si nous disons avec lui que son travail avec Lautréamont est tissé à son travail sur la folie, et qu'il a des rapports avec sa propre vie, avec l'autobiographique, avec cette boussole, Isidore Ducasse, Les Chants, Maldoror et le Comte de Lautréamont ont guidé et conduit un style de travail. Il a trouvé, dans Les Chants, des clins d'œil qui ont marqué, pour lui des balises et ils seront pour lui des signaux sur le terrain de l'art, de la psychanalyse, de la psychiatrie, terrains par lesquels il a parcouru.

En 1943, dans Los dinamismos de la epilepsia, il mentionne, dans une note de pied de page, à peine commencé, que cet article va être le point de départ de deux travaux prochains à être publiés: un sur Van Gogh et l'autre sur le comte de Lautréamont.

Cet article nous donne le ton avec lequel nous continuons à pénétrer dans Les Chants. Il a été lu dans l'A.P.A. le 26 août de la même année. Il considère l'épilepsie ,pour commencer, comme une réponse totale de l'organisme à certaines situations vitales, situation qui a été posée par des poètes, philosophes et jusqu'à certains médecins, signale Pichon, mais qui a été seulement compréhensible à travers la psychanalyse. Au delà de l'analyse détaillée qu'il fait là de l'épilepsie, chaque sous-titre commence à manière d'exergue par une phrase ou deux. La première est une phrase de Freud: "Une agression empêchée semble signifier un grave dommage; tout se passe comme si nous devions détruire d'autres choses et d'autres êtres, pour ne pas nous détruire nous même, pour nous préserver de la tendance à l'autodestruction. Voilà assurément une triste révélation pour les moralistes!" Il s'introduit dans l'épilepsie par le biais de la pulsion de mort et de la libido homosexuelle. Les autres citations, qui sont plusieurs et qui sautent comme lui, du français à l'espagnol, nous mettent sur la trace de la trame par laquelle Pichon donne une place à la psychanalyse, ainsi que les raisons de la préface de son œuvre. Comme échantillon: précède l'analyse de la symptomatologie avec:

Gustave (Flaubert) levait la tête et devenait très pâle, il abatí senti l’aura, ce soufflé mystérieux qui passe sur la face comme le vol d’un esprit, son regard était plein d’angoisse... Maxime du Camp.

Et la signification de l'attaque avec:

J’ai la conviction d’être mort plusieurs fois. Je suis sûr que je sais ce que c’est que mourir, j’ai souvent senti nettement mon âme qui m’échappait comme on sent le sang qui coule par l’ouverture d’une saignée. G. Flaubert.

L'épilepsie n'est pas alors la solitude du criminel... et l'épileptique ne tombe pas parce que il n'a pas où s'accrocher? O. Weininger.

Les psychoses épileptiques sont précédés par:

Pendant plusieurs jours, j'ai été absolument égaré... c'est abominable. J'ai tant crié pendant les crises... que je voulait me défendre et je n'en pouvais plus. Les crises ont tendance à prendre un aspect religieux absurde... comme un superstitieux n'arriverait pas à les avoir...ils m'arrivent des idées embrouillées et atroces. V. Van Gogh

Dans le derniers temps...Vincent (van Gogh) devint excessivement brusque et bruyant, puis silencieux... P. Gauguin

Les études sur l'épilepsie, sur la schizophrénie et la psychose infantile et sur Lautréamont sont lues avec le même prisme. Qu'est-ce qu'attire le regard de Pichon à chaque fois? Il confesse qu'il a une vocation pour l'inquiétant, et que celle-ci a été éclairée par la découverte de la continuité entre rêve et vigile, continuité qu'il l'a d'abord découvert dans les mythes guaranis et puis cette découverte a ensuite rayonné d'une manière fulgurante, depuis son adolescence par les lectures de Lautréamont et Rimbaud.

S'il souligne dans les articles où il parle de ces thématiques, que les crises épileptiques et les manifestations de la folie produisent le sentiment de l'unheimlich; s'il considère que l'article de l'inquiétante étrangeté de Freud est une des contributions les plus précieuses à la psychologie de l'art, qu'est-ce que cet article lui apporte? Si nous nous en tenons à la manière dont lui-même extrait de l'article de L'Inquiétante Etrangeté ce qu'il trouve dans un chemin qui lui est propre, et qu'il a à voir avec sa relation avec l'art et à la pratique avec la folie dans les versions fondamentales de la schizophrénie, l'épilepsie et l'autisme, il trouve dans cet article ce qui est développé dans Lo siniestro en la vida y en la obra del Conde de Lautréamont de 1946, à partir de la même définition de Schelling sur l'inquiétant, que tout ce qui a du rester caché, secret, s'est manifesté et peut être démontré quand on étudie le contenu profond de ce sentiment. De Jentsch, cité par Freud, prend alors la comparaison entre l'impression qui causent les figures de cire, les automates, avec les crises épileptiques et les diverses manifestations de la folie. Ce qu'il trouve c'est cette irruption de ce qui est Dionysiaque dans les images sereines de l'apollinien, ce souffle mystérieux, comme le veut Maxime du Camp, qui passe sur le visage comme le vol d'un esprit.

C'est pour cela que quand il isole d'une manière précoce ce qu'il a appelé oligothymies,à partir de son travail avec les enfants et les adolescents de l'Asile de Torres, alors qu'il n'avait pas encore son titre de médecin, et plus tard dans l'Hospice de las Mercedes, où il a développé ses cours entre les années 1936 et 1948, il les étudie en mettant l'axe sur les troubles qui surviennent dans l'enfance dans le cadre de l'alimentation et du sommeil et dans ce dernier, il souligne l'importance des frayeurs nocturnes et les cauchemars, c'est-à-dire ce qui trace la ligne fragile entre sommeil et veille. Dans ces situations qu'on connaît comme autisme précoce infantile, il a découvert quelque chose qui est dans tout sujet, un certain degré de réserve du monde extérieur pour éviter des situations de tension ou de danger. Il a aussi découvert que c'est à ces situations que ceux qu'on appelle schizophrènes retournent dans le processus de tomber malade. L'étude de troubles graves dans l'enfance a été, pour lui, d'une importance vitale dans la tentative d'éclaircissement non seulement de ce qu'on appelle schizophrénie, mais aussi pour lui proposer la méthode psychanalytique pour son abordage et traitement, en considérant ses caractéristiques comme inhérentes à l'être humain, comme de réponses de l'individu aux avatars de son existence. Aussi, les troubles du sommeil il les a étudié dans le syndrome nocturne de l'épilepsie, dans laquelle il souligne la présence de l'angoisse, l'inquiétude, l'insomnie, les frayeurs nocturnes, la somniloquie, le somnambulisme et l'énurésie, dans laquelle il marque la problématique de l'anéantissement et le renaître contenu dans chaque crise.

Il n'est pas nécessaire de vous dire que toutes ces problématiques ne sont pas pour moi étrangères, et qu'elles m'ont interrogés et servi pour mettre en question d'une manière permanente, ma pratique et ce que la psychanalyse m'a proportionné, puisque j'ai aussi travaillé assez tôt dans un internat avec des enfants à qui on donnait comme épithète celui d'oligophrènes. Mon séjour dans cette institution a toujours été accompagné par une "inquiétante étrangeté", provoquée non seulement par ces enfants que n'avaient pas de passé et qui avaient été déposés là par le gouvernement pour soi-disant s'en charger et les éduquer, mais aussi par ce que le milieu faisait en réponse vis-à-vis d'eux et la manière dont les enfants se débrouillaient avec tout ceci, ce qui m'ont appris beaucoup de choses et ils m'ont laissé avec beaucoup de questions à rechercher.

Je récupère alors la manière dont Pichon introduit la psychanalyse pour rendre compte de la folie, que ce soit dans ce qu'on appelle schizophrénie, oligothymie ou épilepsie, en l'interrogeant d'une une certaine manière avec les exergues - je ne saist pas s'il faut les appeller comme ça, parce que pour l'être nous pouvons dire qu'ils sont excessifs, en questionnant, dans ce cadre dans lequel le témoignage - de Van Gogh, par exemple, dans ses Lettres à Théo, fait faire au texte un changement de direction, au moins pour "le lecteur enhardi et devenu momentanément féroce comme ce qu'il lit.

Cependant, nous signalons qu'en même temps il veut tout expliquer, afin d'encastrer la théorie psychanalytique comme description, d'introduire le dualisme, par exemple en définissant le merveilleux comme contraire à l'inquiétante étrangeté ou l'inquiétant étrangeté comme contre-beauté. C'est vrai que Freud l'a aussi fait, en introduisant en tant que concept le mot sublimation qui, en passant, apparaît seulement deux fois dans toute l'œuvre de Pichon. Mais, comme ce dernier terme dans son dire donne lieu à de notions et fondements différents qui rentrent plusieurs fois en collision, nous allons poursuivre certaines de ses traces, celles qui viennent à notre rencontre dans l'essaim de traces impossibles à distinguer. Et en faisant ceci, nous ne pouvons pas être d'accord avec ce dualisme inquiétante étrangeté-contre beauté/merveilleux. En citant lui-même une des plusieurs définitions de Ducasse - la plus popularisée pour les surréalistes: Beau comme la rencontre fortuite sur une table de dissection d'une machine à coudre et un parapluie, comment il soutient le dualisme inquiétant étrangeté-merveilleux? Comment est soutenue l'inquiétante étrangeté comme contre-beauté? Ou alors la beauté comme contre-inquiétante étrangeté? Pichon soutient que la couverture de l'inquiétante étrangeté se transforme en merveilleux. Or, Les Chants de Maldoror, que Pichon considère comme un poème en prose dans lequel ce qui est surmonté (l'animisme) s'exprime dans toute sa magnificence effrénée, tellement propre du génie poétique de Lautréamont. Avec quelle conception de la beauté aurait à voir avec le génie poétique de Lautréamont? Est-ce qu'il y a une "couverture" de l'inquiétante étrangeté en lui? Il ne s'agit pas, précisément, d'une imprégnation, d'une présence intempestive de l'inquiétant, désagréable, la caractéristique, la beauté de son chant?

Un des points du travail sur le Comte de Lautréamont est la recherche sur la vie de Isidore Ducasse. De ceci, il existe deux articles, tous les deux de 1946, à 100 ans de la naissance de l'auteur: Vida e imagen del Conde de Lautréamont, apparu dans le n° 2 de la revue surréaliste Ciclo en 1946 qui transcrit la conférence du 15 septembre 1946 du cours donné à l'Instituto Francés de Estudios Superiores (la première de 15 conférences) et publiée dans le livre qui a édité Marcelo Pichon Rivière. Et Notas para la biografía de Isidoro Ducasse, Conde de Lautréamont, publié dans le journal La Nación en avril 1946 et publié dans El proceso creador. De l'analyse des chants, il infère des supposés sur la vie de l'auteur.

Pichon Rivière a effectué de recherches à Montevideo et il a été très surpris par la difficulté à trouver de données sur la mère d'Isidore, tout aussi comme pour trouver des informations dignes de foi et exhaustives de celui-ci.

Ces informations recueillies sur Celestine, avec l'acte de décès qui dit qu'elle est morte de "mort naturelle", que dans le langage médical à l'époque selon Pichon, voulait dire suicide, l'ont amené à soutenir cette dernière hypothèse.

Une autre source dont il s'en sert est celle du poète uruguayen Edmundo Montaigne, neveu de Prudencio Montaigne, seul survivant qui avait connu Isidoro Ducasse, quand il avait environ 18 ans. Ami de Francisco Ducasse, il l'a accompagné dans ses "mateadas" jusqu'à ses derniers jours et jamais lui a été mentionné qu'Isidoro était l'auteur d'une œuvre littéraire quiconque et seulement après1875 il lui a raconté que son fils était décédé.

Outre les recherches qu'il fait en Uruguay, et les informations que lui apporte le poète Edmundo Montaigne, il y en obtient d'autres à Córdoba, Argentine, où il se dirige en 1946 pour prendre contact avec la branche de la famille qui s'était installée dans cette ville. Il a eu une entrevue avec R. Lozada Llanes, mari de Amelia Ducasse, nièce de Isidoro Ducasse, décédée en 1937.

"J'ai trouvé la généalogie complète de la famille depuis les arrières grands-parents de Isidoro. Des copies d'actes de mariage, naissance et décès de tous ses membres; la correspondance de Francisco Ducasse - le père - avec ses banquiers de Montevideo, les preuves de deux voyages de celui-ci à Córdoba et un autre en France dans l'année 1873. Aussi, nominations, titres et certificats d'études et la copie de son testament. Mais absolument rien sur le comte de Lautréamont; tout avait été, apparemment, minutieusement écarté, séparé. Aucune référence dans la correspondance du père; seulement il apparaît son nom dans les copies des actes de sa naissance et de son décès".

On suppose que Isidoro est sorti de Paris vers l'Amérique, selon les témoignages receuillis par Edmundo Montaigne de son oncle, à l'âge de 18 ans, en visitant Montevideo et, apparemment, Córdoba aussi. Losada Llanes a manifesté que Isidoro est allé à Córdoba environ en 1868 et il lui a apporté, à cette occasion, les originaux de Les Chants de Maldoror, qu'après consultation préalable au confesseur de la famille, ont fini à l'église du Santo Domingo et ils ont été peut être brûlés. Même si cette visite était une fiction, dit Pichon, Isidoro Ducasse a été désigné dans sa famille comme un fou, un possédé et un blasphème.

En outre, Pichon suppose que Isidoro a été un enfant "guacho" (orphénlin), qui a subi non seulement l'abandon de la part de sa mère décédé prématurément, mais aussi de son père. En réalité, il le suppose car il n'y a pas beaucoup d'informations sur lui dans sa courte vie.

Il a recherché à Montevideo et à Córdoba, l'assemblage, le maillon perdu qui était en réalité en lui, entre le comte de Lautréamont et Ducasse.

C'est à cet enfant Ducasse qu'il trouve derrière la manteau sombre de Maldoror. Un "guacho" (orphélin), avec un mère morte prématurément, mort entourée d'un mystère incompréhensible de la part d'un père qui, de plus, s'est totalement dévoué à la vie politique et sociale de Montevideo à laquelle il s'avait déjà intégrée. Pendant le Siège de cette ville, qui a duré dès 1838 à 1852, cet abandon devait être constant.

" Tout ceci configure un climat d'enfance chaotique et désolant. La meilleure diversion de Isidoro était de contempler, depuis la terrasse de sa maison, les événements du Siège, avec une rivière peuplée de bateaux et des hommes. Et à elle, à cette rivière, il va l'identifier avec l'Océan, comme il apparaît, expressément, dans son "Poème IX" Cette rivière ou mer de son enfance sera l'objet de son grand amour et il va projeter là toute la fantaisie de son monde désespérément humain, halluciné et moral".

Pour Pichon, le fait que Isidoro Ducasse soit né pendant le Siège de Montevideo, avec cet "océan" passionnant, infesté de cadavres qu'il avalait sans plus avec les naufrages des bateaux et les rencontres maritimes et portuaires, uni à l'histoire tragique de la mort de sa mère et l'attitude paternelle, ont joué un rôle décisif. Ce sera la forme qui va prendre comme écrit de Ducasse. Il s'en sert des études de Leandro Ipuche.

Pichon Rivière reprend les chroniques que du côté français racontent le climat du siège, qui est d'ailleurs celui dans lequel vivaient Francisco et Isidoro, en signalant que dans cette guerre sont morts beaucoup d'amis et de connus des Ducasse. Il cite Alexandre Dumas et son Montevideo ou une nouvelle Troie, livre "dicté par Pacheco et Obes à Dumas avec l'objectif de changer l'opinion publique en faveur des assiégés", livre faux - dit Pichon - dans plusieurs de ses aspects mais qui ne laisse pas de représenter une réalité subjective.

Il s'occupe de transcrire, minutieusement, les atrocités que ces chroniques racontent, peut être parce qu'elles ressemblent aux atrocités décrites dans les Chants.

"Combien de fois il aura écouté raconter le martyr subi par Mirquete et Etcheverry aux mains des forces de Oribe et de Rosas. Dépossédés de ses vêtements - dit un chroniqueur - ils ont reçu un coup de lance et après ils ont été promenés tout nus par le camp où ils ont été objet de plus grands outrages. Ils ont été attachés pieds et mains, leurs corps ouverts longitudinalement, leurs entrailles et le cœur arrachées, puis mutilés d'une manière honteuse. Des morceaux de peau leurs ont été arrachés des côtés pour faire des guides pour chevaux et, enfin, leurs têtes coupées et exposées au milieu du champ. L'histoire de la Légion française qui est intervenue dans la défense de Montevideo est pleine de scènes semblables. Et à côté de ceci, la famine, la misère, les négociations, les accusations et la triste histoire de l'intervention étrangère dans le Rio de la Plata, les misions anglaises et françaises, l'entente secrète avec les deux parties, les difficultés du colonel Thiébaut, les tueries de français et la mission de Pacheco et Obes à Paris".

Il dit aussi dans un appel:

"Ma famille comme celle de Lautréamont était française: les deux ont vécu dans un monde inconnu. Et précisément mon enfance comme la sienne, a été une grande odyssée... En outre, n'ai-je pas été marqué, comme Lautréamont, par les "fantasmes" du mystère et la tristesse?"

Pichon marque et remarque constamment de quelle manière toute sa recherche a eu le ton et la couleur de l'autobiographique. Et quand on dit toute sa recherche, nous nous référons à tout le terrain parcouru, si bien que Lautréamont est, comme lui et ses disciples lui reconnaissent, une boussole, bien sûr assez particulière dans son fonctionnement.

C'est pour cela, peut être, qu'il inclut aussi la situation historique-politique dans laquelle Ducasse a vécu et qu'avec cette analyse il soutient ses hypothèses par rapport à son dénouement: Nouveau siège, cette fois-ci à Paris, Lautréamont-Isidore Ducasse: poète assiégé.

Une autre voie d'analyse est celle de l'inquiétante étrangeté dans la vie et dans l'œuvre du Conte de Lautréamont. Dans l'article qui porte ce titre, il fait une lecture détaillée de l'article de Freud et à continuation soutient que toute recherche sur la vie du conte de Lautréamont s'est rendue difficile principalement par deux facteurs externes dérivés du prestige du poète au sein de sa famille et de sources internes propres au chercheur. Il soutient que la plus grande responsabilité du refus du "cas" Lautréamont retombe sur les premiers critiques: Leon Bloy et Rémy de Gourmont, qui mettent l'accent sur le caractère satanique ou démoniaque de Les Chants écrit par un possédé ou un aliéné. Pichon affirme que l'inquiétude produite par son œuvre ressemble à ce qui dit Freud par rapport à la psychanalyse, que pour certains il apparaît comme inquiétante du fait qu'elle met en évidence les forces secrètes qui meuvent notre personnalité.

Il fait une chronologie des commentateurs, en soulignant ceux qui ont commencé à aborder ce qui fait partie de "l'inquiétant étrangeté" dans la vie de l'auteur de Les Chants de Maldoror, "l'histoire noire" qui s'est tissée jusqu'à arriver à supposer la folie du poète. Dans le travail de Pichon Rivière, il est aussi accentué la manière dont l'œuvre du Conte de Lautréamont fait son entrée dans ces terres. Il signale, alors, que le premier à attirer l'attention sur elle a été Léon Bloy et que ses dires arrivent à Rubén Darío et l'influencent, transmettant ainsi ce que Pichon Rivière appel "la légende noire lautréamoniène".

Et pour finir, il y a aussi ses interprétations psychanalytiques du cas Lautréamont.

Avec tout les travaux de Pichon sur le champ de l'art, il est surprenant l'absence quasi absolue du concept freudien de sublimation. Peut-être, parce que Pichon parle d'une métamorphose à l'intérieur de l'artiste qui entraîne aussi celle de l'objet.

Les Chants sont considérés comme le résultat de la fantaisie du poète, fidèle alors à ce que Freud soutient dans La Gradiva, et alors, dit-il, analysé comme un rêve ou une séance d'analyse, il met en conséquence en jeu la répression et non la sublimation, et l'analyse tourne, après, autour de la lutte des opposés moi-surmoi. Le concept qui vient à sa place est l'expérience du merveilleux, base du sentiment esthétique et l'opposé de l'expérience de l'inquiétante étrangeté. Pour Pichon, ce qui est merveilleux est l'élaboration, par le biais de processus mentaux complexes, de l'expérience de destruction, de mort et de l'inquiétante étrangeté.

Il réitère, à plusieurs opportunités, que malgré le fait d'être fasciné par Les Chants depuis son adolescence, la décision de réaliser l'analyse du texte est venue de la rencontre avec le poète uruguayen Edmundo Montaigne. Il le dit ainsi:

"Montaigne était reclus par une forte dépression et cette rencontre a été décisive. Notre dialogue s'est orienté immédiatement sur Lautréamont, puisque des expériences de vie semblables nous amenaient, à tous les deux, à une identification intense avec le conte. Notre amitié a fini tragiquement, avec le suicide de Montaigne".

J'ignore quand est-ce qu'ils se sont connus. Pichon Rivière a travaillé dans l'Hospice de las Mercedes de 1939 à 1949. La fabrication de son cas Lautréamont a commencé avant les conférences de 1946 en Uruguay, comme le témoigne la citation dans son article Los dinamismos de la epilepsia de 1943.

La mort, le suicide de Montaigne renforce en lui la "légende noire" et il essaie de surmonter l'inquiétante étrangeté - en première instance, c'est pour lui qui est inquiétante étrangeté - à travers la "découverte des clefs cachées dans les Chants". Elles apparaissent comme de clefs qui laisseraient hors jeu la "légende noire"; hors jeu l'influence qu'ell exerce sur ceux qui prennent contact avec Les Chants, parmi lesquels il est évidemment inclus.

Lautréamont aurait écrit, ainsi, des clefs qui se trouvent cachées dans le texte; Pichon Rivière considère que le texte de Les Chants est écrit en clé. En même temps, il s'agit de le passer au public, passer cette lecture et ce que le texte manifestement dit. C'est pourquoi el psicoanálisis del Conde de Lautréamont tisse les clefs avec le texte. Il soutient que pour réaliser cette tâche, il les a analysé "comme si c'était le matériel émergent des sessions analytiques successives, comme la chronique du monde interne de Ducasse".

Nous pouvons nous interroger si avec le psicoanálisis del Conde de Lautréamont, Pichon ne jette pas par terre la tâche qui l'anime passionnément de passer au public ce que Ducasse, selon lui, a transmis à travers les chants. Si on pense qu'un psychanalyste prend un poème pour prouver l'existence réel de la théorie psychanalytique, ceci serait confirmé. Or, indépendamment de la mise en question qui évidemment est valable à faire au déchiffrement que Pichon est en train de réaliser, son point de départ est différent. C'est à partir du monde ducassien, depuis cette opération qui réalise sur son expérience de vie, la façon de Ducasse à s'occuper de soi-même à travers ses Chants, le point de départ de l'analyse de Pichon.

Pichon fait une analyse minutieuse des Chants de Maldoror, dont son contenu nous synthétisons ici:

* Déploie les mythes qu'il trouve contenu dans les mêmes

* Raconte, par moments, la thématique des chants, en transcrivant parfois de paragraphes entiers des mêmes.

* Fait interprétations psychanalytiques des chants.

* Réalise de commentaires littéraires.

* Lie le texte avec la biographie de Ducasse.

Il s'avance tout d'abord dans le chemin ouvert par Ducasse, - même s'il s'amuse parfois dans des voies sans issue. Les mythes de la culture guarani lui ont servi de guide, comme nous l'avons vu. Tout ce matériel qui passe par les mains de Pichon Rivière et qu'il pense doit être lu avec ce qui a fourni la méthode psychanalytique - comme un rêve ou le matériel émergent dans une séance analytique - en faisant d'autres lectures - où peuvent être inclus les, les commentaires littéraires, les informations qu'il a pris de l'histoire personnelle de Ducasse et de faits qui ont de rapports avec lui - lui-même nous donne la règle que tout ne rentre pas dans une lecture oedipienne ou, mieux encore, qu'on peut aller plus loin même si lui s'est embrouillé dans cette même lecture.

Si nous pensons dans la forme où sa propre expérience de vie a pu non seulement orientée mais nourrie ses recherches autour de l'inquiétante étrangeté: épilepsie, schizophrénie et autisme unie au champ de l'art, la manière dont il dresse comme de données remarquables, les cauchemars, les frayeurs nocturnes, la manière qu'il conceptualise l'épilepsie, nous pouvons prendre note de l'importance que cette expérience de vie a acquis pour lui dans ses endroits peuplés et influencés par la culture guarani, ses propres expériences avec l'art et la folie qui ont marqué, sans doute, tous ces mouvements tissés et accompagnés par le Conte de Lautréamont.

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BIBILOGRAPHIE

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Zito Lema Vicente, Conversaciones con Pichon Rivière sobre el arte y la locura Ediciones Cinco 1992